Catherine Plassart 2011
Frédéric-Charles Baitinger.
New York, le 30 septembre 2013
L'œuvre "Un Champ d'honneurs", imaginée par Serge Crampon, est une œuvre d'art totale, c'est-à-dire, une œuvre qui, de part la diversité des pratiques qu'elle implique (la sculpture, la peinture, l'art numérique, la danse et la musique) et l'ambition spirituelle qui la porte (donner à voir le mouvement d'une résurrection), se rapproche plus de ce que les anthropologues appellent un rituel, que d'une œuvre d'art au sens étroit où d'ordinaire ce mot s'emploie. Comme la plupart des rituels archaïques, " Un champ d 'honneurs" est centré sur l'image d'un objet totem, le verger, et sur un récit, celui de la chute de l'homme. Mais, à la différence, cette fois , des rituels archaïques, celui-ci n'a pas pour ambition de répéter, sous une forme spectaculaire, les événements décrits dans son mythe mais, au contraire, d'apporter à ce récit un correctif artistique. Le rituel "Un champ d'honneurs" nous donne à voir et à éprouver de quelle manière l'homme, dès l'instant qu'il devient artiste, est capable de relever ce que sa nature fautive avait préalablement détruit. L'œil et le cœur du public participent à cette expérience. Sans le public, le rituel n'est pas possible. En retour, si le rituel a effectivement lieu (et que les arbres, réellement, réssucitent), alors le public n'est plus le public mais quelque chose de plus. L'art se fait alors magie. Et le symbole, force de vie.
Il n'était plus qu'un champ de bataille, un champ de ruines, un champ d'honneurs aussi ... Serge Crampon passe de l'atelier à la scène et associe le chorégraphe et danseur Hervé Maigret à son travail de plasticien pour illustrer la genèse de son exposition éponyme «Un champ d'honneurs». Ces arbres délaissés prennent alors une dimension esthétique, et la perception de leurs formes change en pénétrant un territoire autre que Serge Crampon compose en les mettant en scène. Dans le déplacement et l'interprétation qu'il impose à ces formes déchues, il révèle au coeur de la friche une improbable présence humaine. Le souffle de la mémoire prend alors la forme d'un engagement corporel dans lequel sa passion pour la danse trouve un écho à sa technique gestuelle.
Catherine Plassart - 2011Non, ou pas de façon consciente. Mon parcours artistique exprime généralement les variations de mes états, mes sentiments, mes émotions... C’est un travail plutôt autobiographique dénué de références conceptuelles. Le thème appréhendé sur l’installation Un champ d’honneurs est né du hasard de la rencontre de ce verger déraciné au moment même où je me rendais au chevet de mon père mourant. La superposition entre le sentiment d’une disparition imminente et la vision du verger couché est probablement le facteur déclencheur de cette installation. Si travail de mémoire il y a, il est personnel, bien qu’universel au sens ou chacun peut être amené à vivre ce moment.
Je n’en revendique pas. Je choisi plus simplement d’exprimer le sentiment qu’une vie ne s’organise que dans un sens (celui qu’on aimerait) et que ce chemin s’arrêtera sans que vous ne l’ayez décidé. Il met en évidence un abîme, parfois un chaos confus qui prolongera votre propre chemin, le nourrira, se matérialisera sous différentes formes. Celle proposée dans cette installation en est la double illustration : mémoire/transmission qui réunit et associe à mon histoire personnelle, la double transmission de ce verger par son propriétaire associé à la transmission laissée par mon père.
D’une façon générale, je ne définis pas de critères esthétiques dans mon travail. La seule notion esthétique que je revendiquerais serait celle de la justesse de l’expression en rapport au propos énoncé, quelque soit les moyens techniques utilisés pour arriver au but choisi.
Étudiant aux Beaux-Arts d’Angers j’étais passionné de danse contemporaine que j’ai commencé à pratiquer pour finalement choisir l’expression des arts plastiques. La notion du corps humain en mouvement reste omniprésente dans mon travail. Il y a dans le mouvement un état de devenir.
Oui, dans la mesure où je souhaitais amener une transversalité à ce travail d’art plastique. La danse s’imposait naturellement pour créer un dialogue commun interrogeant tour à tour l’arbre et le corps pour évoquer le tronc, (mot commun aux deux thématiques), sa croissance, ses souffrances, les arbres ont été taillé au long des 19 années de leur vie d’arbre.
Cette évocation échappe à notre temporalité dans le sens où il fait appel à la mémoire émotionnelle. Comme évoquée ci-dessus cette histoire ordinaire se répète dans un espace-temps différent pour chacun de nous. La mort crée un hors temps que nourrit le vivant. Ainsi cette installation s’exprime de façon tout à la fois pérenne par l’histoire à laquelle elle fait référence et éphémère par le sentiment de fragilité que génère la vie.