Catherine Plassart 2010
Autant de traces lourdes destinées à encombrer la terre et à peser sur le sol. Mais dans sa démarche le créateur inclut la fantaisie.
Ses sujets “de hasard” trouvent des vents porteurs favorables, décollent, se dilatent, se propagent et conquièrent ainsi la légèreté utile et précieuse dans un monde qui doit voler. A chaque promenade, dans le but incertain d'une collecte, Serge Crampon rapporte des brassées de matériaux à l'abandon. Informes dans leur délaissement, ils souillent le paysage ou encombrent les décharges. Pourtant, ils possèdent une ombre, celle du souvenir de leur usage, de leur emploi, de leur fonction. Toute l'énergie de l'artiste se concentre sur cette ombre féconde pour nous faire sentir que la vie entière se double de son passé. C'est ainsi que l'idéalisation des modestes scories d'une chatoyante déroute industrielle émerge de l'opération alchimique mêlant expérience de l'activité humaine et pouvoir de l'imaginaire. Dans le Grand-Oeuvre de Serge Crampon qui englobe espace du travail et temps du repos, la philosophie cède au combat éternel et le discours à la sobriété. L'artiste tenace dans sa démarche, rigoureux dans son exécution impliquant de nombreux savoir-faire : peindre, dessiner, sculpter... déploie sans limite au pays du silence et de l'oubli, l'esprit de Résistance. Il est le méticuleux arpenteur d'un vaste espace-temps qui se nomme l'Histoire, le metteur en scène d'un propos. Il enseigne que le monde doit se sentir léger puisqu'enfin l'homme est souverain dans ses rêveries.